mardi 3 juin 2014

Quand un marque-page fait trop bien son boulot

Puisque nous étions dans les choses que l'on trouve dans les livres, restons-y. Une des activités secondaire de la bibliomanie est la recherche compulsive du marque-page. Il m'arrive parfois de me promener dans les dépôts d'Emmaüs. Je leur achète de moins en moins de choses – cela fera l'objet d'un autre propos – mais j'aime déambuler dans l'odeur du vieux papier. Il y circule également une espèce furtive qui feuillète les livres non pour leur contenu mais dans l'espoir de trouver ces petits rectangles de carton. Inutile de préciser qu'une fois leur butin trouvé, certaines de ces personnes ne passent pas forcément par la caisse...
Lorsque l'on sait les prix des livres pratiqués chez Emmaüs, c'est ajouter de la bassesse à la mesquinerie, ce qui n'est pas pléonastique de mon point de vue.
Je possède une collection de marques-page.
Bien malgré-moi.
Cela rempli honnêtement une boîte à chaussures (taille 42). Ces marques-page ont été retrouvés dans les livres et je les en retire.
Pourquoi ?
Regardez bien l'image ci-jointe.
Les marques laissées par ces objets peuvent être désastreuses pour un livre. Cet ouvrage est un numéro de la revue The Quarto, publication anglaise de 1896 assez plaisante, contenant nombre de gravures et de nouvelles d'auteurs comme Chesterton, par exemple. La marque laissée est tellement nette que l'on y devine une publicité pour un vermouth. Cela indique que le marque-page est resté longtemps enfermé pour accomplir son oeuvre. Le papier qui le constituait s'est sans doute acidifié, à moins qu'il ne s'agisse du travail des encres de couleurs.
Voici un joli ouvrage gâché par un objet censé respecter le livre. A ce compte-là, il eut mieux valu corner la page, cela n'aurait pas été pire.
Laisser un quelconque papier dans un ouvrage précieux peut devenir fatal pour celui-ci. Le pire est la coupure de journal dont le papier acide fait brunir les pages par simple contact et ce très rapidement. Mais l'on voit que ce phénomène peut provenir également d'un simple marque-page oublié, apparemment anodin
Vous avez l'explication pour laquelle vous n'aurez que peu de chances de trouver un marque-page dans les ouvrages que je mets en vente.
Alors, ils s'entassent dans ma boîte à chaussure, en attendant.
En attendant quoi ?
Tttt... c'est comme ça que commence une collection.

Ce billet a été publié la première fois sur le blog Feuilles d'automne en juin 2008

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