mercredi 18 juin 2014

Poivreau

Poivreau : Vol commis par un poivrier. (Rabasse)

Poivreau : Ivrogne. — De poivre. — « Je me pique trop le nez, je préfère en finir avec mon existence. Ce sera un poivreau de moins. » (Moniteur, 10 septembre 72)

Lorédan Larchey : Dictionnaire historique d'argot, 9e édition, 1881


Poivreau, s. m. : Ivrogne. Le mot poivreau tire évidemment son origine du poivre, que certains débitants de liquides ne craignent pas de mêler à l'eau-de-vie qu'ils vendent à leurs clients. Ils obtiennent ainsi un breuvage sans nom, capable d'enivrer un boeuf. Que d'anecdotes on pourrait raconter au sujet des poivreaux ! Bornons-nous à la suivante : Un poivreau, que le « culte de Bacchus » a plongé dans la plus grande débine, se fit, un jour entre autres, renvoyer de son atelier. Par pitié pour son dénuement, ses camarades font entre eux une collecte et réunissent une petite somme qu'on lui remet pour qu'il puisse se procurer une blouse. C'était une grave imprudence; notre poivreau, en effet, revient une heure après complètement ivre.
— Vous n'êtes pas honteux, lui dit le prote, de vous mettre dans un état pareil avec l'argent que l'on vous avait donné pour vous acheter un vêtement?
— Eh bien! répondit l'incorrigible ivrogne, j'ai pris une culotte.

Eugène Boutmy - Dictionnaire de l'argot des typographes, 1883

3 commentaires:

  1. arthur23:00

    Dans son "Dictionnaire historique des argots français" (Larousse, 1965), Gaston Esnault note que la graphie "poivreau" est fautive, l'entrée se faisant à "poivrot" (1866), qui renvoie à "poivre", n. m. : 1° Poison : donner le poivre, empoisonner (1821). 2° Syphilis (1608). 3° Eau-de-vie (1836), tout alcool (1898) : mine à poivre, cabaret, et, par excellence, tel cabaret de Ménilmontant (1850). Etym. Du vin corsé de poivre, vieux remède encore usité en 1830. 4° Homme ivre : goupiner le poivre, délester les ivrognes (1835). – Adj. Ivre (1959).

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    1. Arthur, comme je le disais ailleurs, l'argot est somme toute une langue malléable et si je comprends l'entreprise de Larousse qui visait à fixer une langue orale dans un dictionnaire, comme d'ailleurs tous ses prédécesseurs et ses suiveurs, force est de constater que les transcriptions ici se valent, le juge de paix étant la littérature, à savoir, Vidocq, Sue et plus tard Méténier, par exemple... De mon côté, le dictionnaire de Lorédan Larchey indique Poivrot comme une variante de Poivreau dans une édition presque contemporaine de celle de Boutmy. Je pense que Larchey a raison et que les deux graphies sont acceptables, l'une ayant pu, au gré des modes, avoir la préférence...
      Ce qui va me pousser à mettre les définition du Larchey dans ce même billet dès que j'aurai un moment !

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  2. Voici la définition complétée par celle de Larchey...

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