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lundi 29 juin 2020

Lecture du Tenancier


Revenons un instant vers les catalogues de livres, voulez-vous ? Celui d’aujourd’hui est consternant de mauvais goût pour ce qui concerne la couverture, qui ressemble à celle d’un rapport d’une quelconque Direction régionale de l’équipement en 1973. L’intérieur ne vaut guère mieux. Mais, fi de la pâte, jouissons de la substance : cette vente publique propose une série de poèmes autographes de Rimbaud (dont Une saison en enfer), le portrait photographique original par Carjat et Une saison en enfer (Bruxelles, 1873) « non coupé dans son étui de maroquin brun exécuté en 1925 ». À la suite de ces reproductions pleine page, on trouvera l’une des cinq ou six brochures existantes du chant premier des Chants de Maldoror (août 1868) suivi de deux lettres autographes de Lautréamont. On vous passe les autres livres proposés, éditions originales avec ou sans envoi, reliure pleine soie pour certains, etc., presque du banal en regard des pièces maîtresses. Me prendra-t-on pour un « Rimbaldiste » ? La possession de ce catalogue, en vérité, est le fruit du hasard lors de la récupération d’un lot de ceux-ci il y a longtemps. Ma bibliothèque ne comporte que quelques écrits périphériques autour de Rimbaud et guère mieux pour ce qui concerne Lautréamont et de maigres volumes de leurs œuvres. Par ailleurs, le soussigné moi-même se fiche assez des performances de la vente du 17 novembre 1998 à Drouot. En revanche, la reproduction des documents et des couvertures des ouvrages provoque toujours l’intérêt de l’amateur de livres que je reste. Je ne puis que vous recommander la vigilance lorsqu’un libraire ou un bouquiniste se débarrasse d’un lot de catalogues, on y croise de temps à autre des articles sensationnels et des curiosités. Dans certains cas, les rencontres sont étranges et sources de regrets, moi qui n’ait pu m’emparer d’un catalogue où l’on contemplait des photos de Michel Simon dans des ébats empreints d’une saine pornographie ! Sachez également que ces brochures constituent parfois l’unique occasion de découvrir une page manuscrite, un document, un livre ou une photographie avant de rejoindre l’obscurité d’un coffre ou le secret d’une bibliothèque. On reviendra de temps en temps sur le sujet des catalogues, fussent-ils de libraires ou bien de ventes publiques… enfin, si l’envie nous en prend, bien sur.

samedi 2 mai 2020

Lecture du Tenancier

Rien de récent (ou si peu), et comme ça lui chante.



Quand Arthur Rimbaud entre à l’Académie française, le 16 janvier 1930, personne ne semble se souvenir de « l’homme aux semelles de vent », du chérubin diabolique des « Réparties de Nina » et des « Assis », ou du « voyou » voyant qui avait défrayé la chronique du petit milieu poétique français vers 1872. Curieusement, Valéry, qui prononce l’éloge du nouvel académicien et qu’on a connu plus méticuleux (lorsqu’il préface La Fontaine ou Mallarmé), expédie lui aussi ces premières œuvres en trois phrases :

Je n’oublie pas, Monsieur, que vous n’avez pas commencé d’être des nôtres avec ce gros livre [Les Nuits d’Afrique] : de minuscules plaquettes l’avaient précédé, qui devraient bien, un jour, être rééditées. Vous vous y montriez, en vers et en prose, l’un de nos premiers symbolistes, un peu moins connu, mais un peu plus précoce, un peu plus tourmenté, un peu plus visionnaire que les autres. Ainsi, avant de vivre vos mille et une nuits d’Afrique, vous vous étiez payé le luxe d’une brève « nuit de l’enfer » et celui qui devait emprunter tant de voiliers et de cargos dans monde s’y rêvait joliment « bateau ivre »…
[…]

Cette première page du livre de Dominique Noguez pose d’emblée l’enjeu du livre. Rimbaud ne meurt pas dans les circonstances que l’on connaît mais se survit à lui-même, rédige un roman remarquable, Les Nuits d’Afrique, lui valant l’amitié de Breton. Celui-ci l’excommunie — bien entendu — quelques temps plus tard, lorsque Rimbaud prend la défense de Claudel dont il épouse la sœur… Alors, Rimbaud deviendrait-il l’impensable, un poète chrétien, sanctifié par l’Académie ? Le jeu de Noguez est plus subtil et dépasse le cadre habituel de l’uchronie, qui emprunte habituellement des voies plus ludiques. Ici il nous mène à un essai littéraire démontant le mécanisme de l’évolution du « Grantécivain » (autre titre de Noguez). Curieusement (ou pas, selon votre chapelle), le cheminement de Noguez reprend quelques jalons posés par Enid Starkie, fort empreint de l’idée d’un Rimbaud chrétien. Pourquoi pas, si l’on considère l’évolution de nombre d’écrivains de sa génération ou de celles d’après dans des voies parfois plus tortueuses. Une véritable curiosité littéraire, en tout cas, sur des traverses inaccoutumées.

lundi 12 janvier 2015

Rendons service à Fabrice...

« Les confidences de Lucchini », L'Obs n° 2648 du 8 janvier 2015

Oui, rendons-lui service en l'orientant vers un endroit où il aura quelques éléments de compréhension, c'est-à-dire ici, par exemple. Nous comptons sur nos lecteurs pour lui en indiquer d'autres et surtout sur ce qui devrait être compris d'un poème. Enfin bref...
Autrement, je m'interroge sérieusement sur l'intérêt de déclarer que son chauffeur de taxi était Marocain. Était-ce pour souligner l'exceptionnelle attention du chauffeur en qualité de taxi, de Marocain, ou de transporteur de cabot ?
Hasard des hasards, se pointait en couverture du même canard un autre de ceux que nous avions représenté dans nos « vœux », avec la « une » la plus sombrement hilarante de ces derniers jours :


Comme quoi on devrait se méfier : quand on évoque la sottise, on prend le risque d'être très tendance...

dimanche 9 novembre 2014

De la friture sur la ligne éditoriale

On se découvre toujours une joie mauvaise quand on s’aperçoit que l’on est débordé en talent pour ce qui est du courroux et du sarcasme, quand cela porte sur la même personne et pour la même cause. A propos de l’affaire de l’article sur l’ouvrage d’Eddie Breuil consacré à l’attribution des Illuminations, on vous avait fait part il y a quelques temps de nos réserves sur l’honnêteté de la critique livrée dans Libération. Le Préfet maritime, animateur de l’Alamblog exécute ce même critique avec une verve et une justesse que votre Tenancier est bien incapable d’égaler. Il vous convie donc à ce moment de plaisir en vous dirigeant vers ce billet.
Rendez-vous .
Par ailleurs, on vous recommande une nouvelle fois de vous rendre sur le blog de Grégory Haleux pour dauber ensemble les excès de l’exégèse rimbaldienne, les psychanalystes semblant détenir un record assez inégalé en la matière.
Cliquez donc ici.

lundi 3 novembre 2014

Où le Tenancier s'interroge sur Rimbaud et le psittacisme — Ce qui ressort de sa péroraison — Ses conjectures — Ses hommages et ses compliments

Il est des attitudes chez des journalistes que l’on espérait éteintes non par l’éveil soudain à une conscience éthique mais parce que la simple prudence commande désormais de faire attention à ce que l’on écrit. Cette prudence est largement motivée par le fait que les informations qui circulent ne sont généralement plus à l’usage exclusif d’une profession mais également accessibles au tout venant des curieux. On rétorquera avec raison que le traitement de l’information de ces professionnels diffère de ce qu’en fait généralement le simple quidam, à savoir l’astreinte au recoupement et à la vérification. C’est une donnée fondamentale du journalisme : si l’on doit rendre compte d’un sujet on doit savoir de quoi l’on parle. Si l’on trouve éventuellement à redire sur la pratique journalistique, il est une catégorie de cette profession qui s’assure une impunité plutôt spectaculaire. On veut parler ici du critique littéraire appointé par un journal. Passent la mauvaise foi ou le manque d’objectivité, le copinage ou l’usage immodéré du copier/coller des prières d’insérer du service de presse… Ces pratiques-là réclament de l’indulgence. Le critique a des factures à régler comme nous tous et sans doute une famille. Qui alors n’a pas eu la tentation d’aller au plus simple ? Et qui somme nous pour priver le petit Kevin de sa glace à la pistache, mmmhhh ?
Il est en revanche un pratique irritante, un sport curieux auxquels se livres d’autres personnes qui se sont insinuées dans la profession par on ne sait quelle voie mystérieuse. Faire le résumé d’un ouvrage pas encore paru nous semble non pas le symptôme d’une malhonnêteté insigne — quoique ce type d’action relève du manifeste —  mais d’une sottise sanctuarisée en posture idéologique (car nous n'osons croire à la malhonnêteté qui commettrait des sottises, ce serait trop injuste). Que l’on nous entende bien lorsque nous évoquons un livre « pas encore paru » : Il s’agit d’un ouvrage d’Eddie Breuil qui pose la question de l’attribution des Illuminations de Rimbaud qui serait en grande partie redevable à Germain Nouveau. Notre source nous a assuré que l’ouvrage n’avait pas été distribué en service de presse ni sous forme de bonne feuille (en papier ou en fichier pdf) le jour de la parution de la critique. Or ce « critique » publie un papier qui se résume à une charge malencontreuse et qui a de grandes chances d’être injustifiée — du moins est-ce l’impression de ce qui ressort des premiers témoignages de lecteurs du livre.
On passerait encore sur le doute que cette personne jette sur le travail de l’auteur, on s’irriterait alors d’autant sur l'accent employé qui clôt la notule. On vous livre ce passage sans supplément :
 «  Le ton de Breuil est dans l’air du temps : anti-élitisme, paranoïa anti-critique. Les " universitaires" – Breuil en est un, qui va soutenir une thèse sur Histoire et théories de l’édition critique des textes modernes — et les critiques sont des perroquets qui vont répétant les mêmes erreurs fondées sur les mêmes présupposés. Encore un chevalier blanc. » 
On pourrait rétorquer à peu de frais que le psittacisme de ce critique est lié à un extraordinaire don de télépathie puisqu’il se prononce sur un livre dont il n’a pas vu la couleur. Au fond, nous retrouvons la même frilosité qui s’empare d’un certain milieu, qu’on hésite à accoler à la notion de littérature et d’érudition, et qui, se délestant de tout scrupule critique, s’empresse de dénigrer ce qui pourrait éventuellement bousculer le piédestal du Grandautheur, à savoir ici Rimbaud. On sent confusément le désarroi d’un besogneux devant cette possible révision, la remise en question du dogme qui veut que tout ce qu’il a lu d’un auteur est forcément de lui et à jamais et particulièrement à propos d’écrivains ou de poètes inamovibles dans le panthéon littéraire. Pour des auteurs dits mineurs, cela passe un peu mieux, voire on s’en amuse comme de Michel Verne réécrivant nombre de livres de son père. Mais Rimbaud, songez-y… C’est que la réfutation après coup peut s’avérer difficile ; alors nous assistons à de ces pathétiques tentatives de discrédit par prétérition. Le confort plutôt que la réflexion.
Votre Tenancier n’a pas lu l’ouvrage et il se gardera donc d’en exposer la teneur en détail même si maintenant des critiques plus honnêtes sont parues. Allez les lire. Ce qu’il en a compris — et certainement pas par l’article évoqué plus haut — est suffisamment intéressant pour qu’il en envisage l’emplette un de ces jours. Il se fera une opinion mais ne la partagera pas car ce n’est ni un spécialiste de Nouveau ni de Rimbaud. Le Tenancier est un simple pékin en pantalons de nankin à prendre avec des baguettes. Il biche toutefois à la probable perspective d’un examen critique de la part de Grégory Haleux, homme perspicace dont on aimerait par ailleurs observer la rencontre avec Eddie Breuil, si elle pouvait se faire un jour. Nous réservons dès maintenant notre strapontin.

Eddie Breuil : Du nouveau sur Rimbaud — Honoré Champion

Site de l'éditeur.

  • Pour consulter l'article dont nous parlons c'est ici. (Philippe Lançon : Haro sur Rimbaud — Libération du 30 octobre 2014)
  • On vous conseillera un article plus documenté et honnête sur le site actualitté.com, cliquez .

mercredi 4 juin 2014

La gueule de Rimbaud

L’un des meilleurs blogs de ce côté-ci de la galaxie est assurément Soli Loci, le blog de Grégory Haleux. C’est un garçon énervant : il lui arrive de faire des dessins intéressants, des livres pas mal foutus, et quelques billets qui nous réjouissent, dont le dernier. C’est déloyal, il en reste peu aux autres pour briller. Parlons-en, tiens, du dernier billet. Son titre est : Rimbaud à l’épreuve de la biométrique de similarité. On sait que la récente découverte d’un nouveau cliché a déclenché une nouvelle polémique sur son authentification. On a cru lever le doute par le recours à des moyens scientifiques pour corréler plusieurs portraits de Rimbaud à celui qui était en question. Cette méthode, la biométrique, semblait aux dires des expérimentateurs et de ceux qui s’en firent l’écho — dont nombre de journalistes —un procédé infaillible. Grégory en démontre les faiblesses dans un long article fort bien garni.  On n'ajoutera rien ici à sa démonstration magistrale propre à réintroduire un doute sur la légitimité de l’identité du personnage photographié. La méthodologie qui a présidé à « l’authentification » est lacunaire en en devient douteuse. Petite cerise sur le gâteau, mais cerise fort goûteuse, un certain Arthur complète le billet par un commentaire qui évoque la personnalité des découvreur dont il semble que l’inédit photographique soit devenu un sorte de spécialité (Le « vrai » portrait de Lautréamont, par exemple). Curieuse, cette récurrence de découverte qui tombe à chaque fois sur les mêmes personnes…
Pour notre part, nous nous moquons éperdument du visage de Rimbaud comme celui de Lautréamont. Seule leur poésie nous importe, ce en quoi nous tombons d’accord avec Grégory.
Sans vouloir inférer une quelconque malice sur les intentions des découvreurs, il nous revient en tête que la découverte de toiles de Vermeer à motif biblique survint juste au moment où les historiens de l’art se posaient la question de leur existence. Seulement ces toiles étaient d’un certain Van Meegeren. A force de trop attendre certaines choses, il ne faut guère s’étonner qu’elles nous persuadent de leur apparition, quitte à ce qu’on leur donne un coup de main pour expliquer le mystère de leur existence.