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dimanche 3 janvier 2021

Truffes


La seule maltraitance que j’inflige aux livres, c’est de les « truffer », parfois jusqu’à les déformer. J’aime que certains d’entre eux — on pourrait, comme dans les bibliothèques publiques, les appeler des usuels — soient gonflées de souvenirs se rapportant à telle ou telle page, intercalés. Les cartes postales, de paysages ou de reproductions d’œuvres d’art, les étiquettes d’hôtel ou les tickets de tramway ou de bateau sont autant de décorations décernées.
 
Bernard Delvaille : Pages sur le livre (2004)

vendredi 2 mars 2018

Un moment paisible

Le Tenancier pour se distraire, et connaître la région dans laquelle il s’est installé encore récemment, fréquente les vide-grenier. La pratique lui permet de connaître les bourgs avoisinants et, de temps en temps, d’avoir des contacts avec les indigènes. Le dernier en date s’est déroulé dans un gymnase : on repassera donc pour la topographie locale, déception mineure puisque nous connaissions déjà Carentoir un peu, étant donné que c’est le berceau familial. D’habitude, votre Tenancier découvre fort de chose en matière de livres dans ces déballages, sinon de la littérature Kleenex et des livres pour ado, ce qui revient à la même chose… Or, dans cette manifestation, nous sommes tombés sur un couple de retraités sympathiques qui avait disposé deux ou trois cartons de bouquins. Rien de bien exceptionnel dans les trouvailles : des 10/18 que vous découvrirez un de ces quatre, des Que-sais-je ? dont on se dit qu’ils commencent à être moins courants et d’autres petites choses. La meilleur pièce était bien ce Poètes d’aujourd’hui consacré à Genet par Jean-Marie Magnan, chez Seghers. C’est en le feuilletant en retour d’expédition que nous sommes tombés sur ce morceau d’ancien accusé de réception des PTT, truffe improvisée qui, ouvre souvent à des conjectures, dès lors que l’on rencontre un nom connu. Voici un marque-page qui ouvraient à quelques interrogations : 


D’abord, est-ce le Fallet auquel on pense ? Habitait-il Courbevoie ? Dans cette éventualité, ce livre lui a-t-il appartenu ou bien était-ce à l’un de ses correspondants ? Et puis, d’abord, qu’est-ce que cela peut faire ? À cette dernière question il est aisé de répondre : comme en cuisine, l’art de la truffe fait appel à l’inventivité et à l’imagination.
Nous avons passé, de notre côté, un fort bon moment à la rêverie et aux conjectures stériles. On a conclu à rien, seulement à notre plaisir.

lundi 18 septembre 2017

Oracle

Ce billet paru en avril 2009 sur le blog Feuilles d'automne est aussi un hommage au temps qui passe et aux promesses non tenues... car j'attends toujours mon grand barbu, moi.



La lecture de livres d'occasion est parfois balisée de signes plus ou moins ténus. Ainsi, taches, cornes, rousseurs viennent dégrader progressivement l'ouvrage jusqu'à ce qu'il tombe dans la main attentionnée du libraire, lequel fera ce qu'il pourra pour améliorer les choses, c'est à dire peu. En effet, revenir sur une rousseur ou une pliure est une gageure. Et puis il y a ces objets épars, évidents ou incongrus, tels les marques-pages, les coupures de presse, des coupes-papier (nous avons eu le cas), des bouts de papier-toilette de différentes qualités sans doute pêchés à la hâte lors d'une lecture dans les lieux, des bouts d'allumettes, des tickets de métro, des photographies, autant de signes de l'activité ou de la situation plus ou moins soigneuse dans laquelle le lecteur se trouvait avant de refermer définitivement le livre et avant qu'il se retrouve sous l'attention du professionnel. Il faut alors être impavide et éliminer la plupart de ces artefacts, facteurs de dégradation. De ces traces, l'on ne fait quasiment rien, sinon que de les destiner à la poubelle ou à la boîte aux marques-pages. Ces vestiges ne signifient pas grand chose, hormis les coupures de presse. Celles-ci sont soigneusement rangées à la fin des ouvrages à une place ou la brunissure du papier ne risque pas de contaminer le coeur de l'ouvrage.
Mais il est d'autres signes plus parlant : dessins d'enfant, lettres de recommandation, d'amour ou cartes-postales estivales, etc. Il y a alors un déchirement à jeter cette intimité-là. On voudrait la rendre à leur propriétaire.
Enfin, il est une apparition fugace, trois en plus de dix ans qui, j'en suis certain, m'avertit de quelque chose... mais de quoi ?
Je ne me rappelle plus ou j'ai trouvé les deux premières. La troisième vient d'être trouvée il y a quelque jours dans un numéro des « Temps Modernes ». Ce sont des cartes rassurantes, pas méchantes...


Mais dois-je m'inquiéter ?
Car si le Pique arrive, dois-je préparer ma couche, réunir mes enfants et mes amis ?


On n'en voudra pas au signataire de ce billet de se payer le luxe d'une petite superstition de temps à autre. Manie qui tourne court devant l'ignorance de la signification de ces cartes distillées au long du temps. Suis-je à la fin du tirage ou dois-je encore attendre ? A quoi cela se rapporte-t-il ? Dois-je lancer des conjectures sur les fortunes de la librairie ou alors sont-ce des avertissements à titre individuel ?


Naturellement, ces questions ont suscité quelques réponses en commentaires, notamment celles d'ArD et d'Otto que nous reproduisons ici :

Paraît que les jeux, depuis Aristote, sont perçus comme un délassement, et aussi comme une occupation qui détourne les hommes de la recherche de la vertu. A votre place, je ne serais pas dubitatif, mais sceptique.
La Reine de coeur vous tirera de ce mauvais pas, très certainement.

ArD


Les dames de coeur, oui. Mais le prix en est élevé. Le libraire n'a pas de vertu, il a des passions.

Le Tenancier


[...] Pour le reste, mon bon Tenancier, rassurez-vous, ce tirage, si l'on pouvait dire que c'en est un avec seulement trois cartes, me semble plutôt bon : vous allez tomber amoureux d'un grand barbu !
Si je sombrais dans la facilité vulgaire, j'en profiterais pour ajouter qu'après le tirage, vous risqueriez donc d'avoir également le ramonage. Mais vous savez à quel point ce genre de plaisanteries navrantes m'est étranger.

Otto Naumme


Le Tenancier ne risque-t-il pas d'être laissé sur le carreau avec un tel tirage ?!
En tout cas, cher Otto, je vous félicite, vous ouvrez une voie sur ce blog. Enfin.

ArD


Oui, chère ArD, j'ai toujours été partisan de la nouveauté, de l'extrême (mauvais goût, notamment). Mais votre mot final est juste, ma naturelle timidité (et ma fainéantise presqu'aussi importante que celle de notre ami Tenancier) me fait souvent reporter mes audaces (et d'en dire, d'ailleurs, "Oh dace, oh désespoir", hum...).
Cela étant, n'étant pas barbu (mal rasé seulement), je laisserai au Tenancier le plaisir de discuter couloirs de cheminées avec d'autres personnes à la pilosité développée. Il faut savoir rester à sa place.

Otto Naumme


Je vois, Otto, que votre séjour en Roumanie vous a profité pour l'extension de vos jeux de mots. Pour le reste, je continue d'être dubitatif sur la signification de ce tirage.
Oui, je dubite.

Le Tenancier

mercredi 14 juin 2017

Persistance du Père Dupanloup

Notre existence se ponctuent de souvenirs plus ou moins frais. Chacun ses petits grigris pour les raviver, chacun ses moyens pour les faire perdurer.
Comme nous parlions du Père Dupanloup, voici un petit papier découpé dans feu Charlie Hebdo, il y a bien longtemps. Il fut longuement conservé dans un portefeuille en cuir mal tanné qu'on trouvait à la sauvette à la sortie du métro parisien, un portefeuille en cuir rouge. C'est une sorte de truffe orpheline, puisqu'elle n'a jamais trouvé le livre qui lui convenait pour l'y glisser. On a souvent pensé que, peut-être, le Manuel secret des confesseurs aurait pu être le réceptacle adéquat... ou bien dans les Romans à lire & Romans à proscrire, de l'abbé Bethléem. Mais nous trouvons cela un peu facile. Le petit papier a presque quarante ans d'âge et nous continuons d'être confronté au paradoxe de devoir trouver un livre pour cette truffe. Nous ne comptons pas sur la diligence de nos lecteurs, sinon une vague piste, histoire d'entretenir l'espoir ténu de fixer ce brin de mémoire dans un livre... On espère alors du subtil.
Si si...

samedi 30 juillet 2016

Un papillon jaune


On trouve parfois quelques prières d'insérer ou des publicités qui peuvent enrichir une collection ou même un ouvrage unique. Le petit papillon ci-dessus figurera bien dans l'un des ouvrages exposés dans la liste au verso et ici en regard.
Il vous suffira de trouver le papier mais également l'un des ouvrages...
Et puis aimer Rosny aîné, bien sûr !

(Cette notule a paru pour la première fois sur le blog Feuilles d'automne en décembre 2008)

lundi 26 mai 2014

Truffes & petits papiers

On trouve de tout dans un livre.
— Des tickets de métro
— Des tickets de cinéma
— Des articles de journaux, quelquefois sans rapport avec le sujet du bouquin 
— Des cartes postales…
Et puis, on trouve l'image ci-contre.
C'est Didier Deaninckx qui, je crois, avait fait un roman sur les canaques du jardin d'acclimatation. Si l'on avait besoin de se convaincre que ce n'était pas une fiction, en voici la preuve. 1000 crocodiles, des canaques avec des “danses expressives”, le tout à Paris en 1931, comme l'indique le verso de ce ticket : du colonialisme sans arrière-pensée. Cela vaut bien des romans engagés sur le sujet. Les livres truffés se font rares. Beaucoup de confères en suppriment le contenu. On ne peut leur donner tort, car la mauvaise qualité du papier dont sont constituées ces truffes peuvent tacher irrémédiablement un livre précieux. Pour ma part, j'élimine du livre tout ce qui est sans rapport et je m'arrange pour que les documents restants soient contenus dans un papier un peu plus neutre, si possible. Le reste constitue un musée secret, une exposition permanente à côté de mon bureau. On reviendra de temps à autres sur ce sujet.
Mais, ces petits papiers sont-ils vraiment des “truffes” ? En réalité, non. Dans le jargon de la librairie le mot désigne le plus souvent des documents insérés dans un ouvrage et qui ont un rapport parfois étroit avec le sujet de celui-ci : coupures de presse, lettres tapuscrites ou manuscrites, cartes de visite, etc. Mais ici, la licence poétique n'interdit pas de considérer ce ticket comme une truffe valide. Il suffit de prétendre l'avoir trouvé dans Le livre du Zoo, de Suzanne Pairault, par exemple, même si le livre est tardif. Ou mieux encore dans le livre de Didier Daeninckx auquel je faisais allusion plus haut et dont le titre est Cannibale.
Rappelons que le must est de trouver une lettre autographe de l'auteur. De quoi vous rendre jaloux. J'ai des noms.

Ce billet, très légèrement revu, a été publié la première fois sur le blog Feuilles d'automne en juin 2008

Renvoyons nos lecteurs au billet du blog de George WF Weaver, ou il est question de l’expo coloniale mais de bien plus encore. Nous sommes bien loin du bois mystérieux d'un André Hardellet...