mardi 27 mai 2014

Lorsque le Tenancier éditait — II

Le logo de L'astronaute mort
Je m’aperçois que j’ai été bien vite en besogne en évoquant les débuts de l’astronaute mort. En effet, j’ai omis de préciser les objectifs de la collection, ce qui a son importance. Chaque volume publié dans « La Bibliothèque sublunaire » était à tirage limité sur papier vergé numéroté. Cette intrusion de la bibliophilie — modeste, tout de même — dans le petit monde de la science fiction n’était pas si courante et ces publications demeurent marginales à l’heure actuelle. Rien d’étonnant à cela. Cette littérature populaire — ce n’est pas un terme péjoratif à mes yeux — est à obsolescence rapide, non par le style ou par la mentalité des personnages mais plutôt parce que l’avancée technologique rend nombre de récits caducs, notion un peu contradictoire avec celle de la bibliophilie. On ne glosera pas plus sur cette idée car elle nous entraînerait fort loin de notre sujet. Implicitement, l’enjeu de la collection était également de publier des titres qui devaient s’assurer d’une certaine pérennité outre leurs qualités littéraires. Ces premiers tirages courts, à prix raisonnable devaient assurer l’édition des quelques volumes que nous projetions. Cela dépassa nos objectifs. Il faut insister sur le fait que l’opération ne pouvait réussir que parce que cette entreprise n’avait nul but lucratif (L’astronaute mort était une association « Loi 1901 ») et parce que Christian Laucou, l’imprimeur, s’était piqué au jeu. La distribution des ouvrages se fit par correspondance. Les marges que nous appliquions sur nos ventes ne nous permettaient pas de supporter un autre mode de revente. Il faut signaler la solidarité et la générosité de quelques fanzines qui me communiquèrent leurs fichiers d’adresses. L’Internet était encore très embryonnaire et, malgré le fait que nombre de lecteurs de SF étaient également des geeks, ce mode de diffusion des annonces de parution n’était pas vraiment dans les mœurs… On eut recours à l'enveloppe timbrée.
Votre Tenancier, à cette époque, dut également se remettre à l’informatique. J’avais mollement tripoté un zx81 quelques années auparavant. Je me  retrouvais désormais doté d'un PC sous DOS — j’assume encore ce retard technologique, je suis un nostalgique de la ligne de commande — équipé d’un logiciel de traitement de texte pour saisir certains manuscrits. Ceux-là étaient ensuite transmis à Christian Laucou qui les préparait pour impression. Signalons que l’impression numérique était devenue assez performante pour se conformer à notre projet, entreprise presque impossible s’il avait fallu recourir à la typo au plomb, ce dont Christian était fort capable, puisque c’est son métier et son grand talent, mais à un coût nettement supérieur.
Si l'adhésion des auteurs fut effective, je pense que c’est aussi une idée qui flatta un peu leur vanité. Qui leur en voudrait ? Quel auteur n’éprouve pas le plaisir de voir son texte un peu plus soigné qu’à l’ordinaire ? Pour l’avoir éprouvé (merci, le Visage Vert !), je sais que le cœur est faillible. Lâchement, je sus en profiter. 

(A suivre)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire